Peur de rien
Céline Claire, Hector Dexet
Amaterra, 2013
La couverture est alléchante : un chat avec une souris juchée sur son crâne ! Le rongeur pérore sur la tête du félin, passablement irrité… Bonne amorce.
La suite ne déçoit pas : cet ouvrage cartonné (et donc résistant !) est bâti sur le principe du rabat à soulever, dissimulant une surprise que l’on peut toutefois attendre, deviner, grâce à un « indice » qui dépasse : la queue du chat menaçant la petite souris présomptueuse en train de fanfaronner « Moi je n’ai peur de rien », par exemple, ou la queue du chien menaçant le même chat en train de fanfaronner à son tour « Moi je n’ai peur de rien ». Au plaisir de l’étonnement se mêle donc celui de la randonnée : comme le veut le genre, tout repose sur la variation à partir du même, puisque chaque formule pour introduire ce qui fait peur est unique (« gloups, à l’aide », « Mais je me méfie des… », « fuyons », etc.). La chute est amusante et rappelle un peu celle du classique La plus mignonne des petites souris (Père Castor, Flammarion).
A ces atouts s’ajoutent des dessins lisibles et drôles (il faut voir le chat tout hérissé qui s’enfuit devant le chien… !). Que demander de plus ? Une réussite sans esbroufe.
Le boulanger des croissants
Yannick Beaupuis
Balivernes, 2013
Cet album a deux gros atouts. Le premier saute aux yeux : les personnages et les décors sont faits de cubes de bois au visage très expressif (les yeux sont des rondelles de métal). Du Christian Voltz à la mode xylo en quelque sorte !
Le deuxième atout réside dans le thème abordé : la naissance du capitalisme, l’agriculture intensive et ses ravages, le morcellement du travail, la société de consommation. Voilà des questions économiques que l’on ne traite que très rarement en littérature de jeunesse, où l’argent, l’exploitation de l’homme par l’homme sont des sujets plus tabous que le sexe en son temps.
Cela dit, le ton n’est pas toujours folichon : les dialogues deviennent parfois un peu didactiques mais heureusement, ce n’est que provisoire et l’équilibre est vite rétabli en faveur d’une histoire chaleureuse d’amitié sur fond d’écologie et d’humanité. Quoi qu’il en soit, l’audace de l’entreprise est à saluer, ainsi que l’adresse au lecteur qui clôt l’album : « Fin de l’histoire (mais la nôtre reste à écrire…) ».